Un congrès attendu après douze ans de silence
En annonçant la tenue de son deuxième congrès ordinaire du 12 au 14 novembre à Brazzaville, l’UPADS tente de renouer avec une base militante restée orpheline de grands rendez-vous internes depuis 2012, date du précédent conclave.
Le parti fondé par le professeur Pascal Lissouba, premier président démocratiquement élu du Congo en 1992, veut afficher une image rajeunie et disciplinée avant la présidentielle de mars 2026, échéance que tous ses cadres décrivent comme « cruciale » pour leur survie politique.
Calendrier interne et pression électorale
Entre la campagne d’adhésion lancée l’an dernier et la redistribution des cartes régionales, le congrès se positionne comme la dernière étape formelle avant la désignation du candidat UPADS qui devra, d’ici fin 2024, se déclarer auprès de la Commission électorale nationale indépendante.
Les débats programmatiques prévus en novembre aborderont notamment l’alliance possible avec d’autres formations d’opposition, question délicate depuis les dissensions internes consécutives à la perte du pouvoir en 1997, mais désormais inévitable face à l’appareil bien huilé du Parti congolais du travail.
Alliances possibles avec la majorité présidentielle
Plusieurs analystes évoquent déjà la piste d’un soutien indirect de l’UPADS à la candidature que proposera la majorité, sous forme d’un accord de gouvernance partagé, scénario jugé « réaliste » par un ancien ministre qui rappelle que « la stabilité est redevenue la valeur cardinale » depuis 2021.
Le Bureau politique du Parti congolais du travail ne ferme pas la porte, estimant que la pluralité des voix peut renforcer la légitimité du futur chef de l’État, tandis que l’État garantit un financement public équitable de la campagne comme le prévoit la loi électorale révisée.
Enjeux générationnels et renouvellement interne
Au Conseil national d’août, les délégués ont exigé qu’au moins la moitié des postes de responsabilité revienne à des militants de moins de quarante ans, revendication en phase avec la démographie d’un Congo où 60 % de la population est née après 1985.
« Nous voulons parler la langue des réseaux sociaux sans perdre nos racines », précise Steve Mouanda, coordinateur de la jeunesse, qui plaide pour un mix technocratique et militant afin d’éviter le fossé observé lors des législatives de 2022, marquées par une abstention record.
Financement et transparence au cœur du débat
La question de la bonne gestion des cotisations revient avec insistance, certains cadres redoutant que l’image du parti ne soit brouillée par d’anciennes querelles autour des fonds de campagne, même si aucun dossier n’a jamais été transmis à la justice congolaise.
Le gouvernement, qui a récemment publié le décret d’application du nouveau code de transparence politique, assure qu’il procédera à un audit croisé des comptes de tous les partis bénéficiant de subventions publiques, initiative saluée par la société civile comme un pas vers la normalisation démocratique.
La stratégie du Parti congolais du travail
Du côté de la majorité, les observations sur le congrès de l’UPADS sont jugées « positives » car elles témoignent, selon un porte-parole du PCT, de « la vitalité d’un pluralisme que le président Denis Sassou Nguesso a toujours garanti en dépit de défis sécuritaires régionaux ».
Le PCT mesure toutefois chaque mouvement de l’opposition, conscient que la dispersion des voix au premier tour pourrait rallonger le calendrier et peser sur l’agenda économique 2024-2028, dominé par les grands chantiers d’industrialisation inscrits au plan national de développement.
Scénarios pour la présidentielle de mars 2026
Les politologues brazzavillois envisagent trois issues principales : un candidat UPADS autonome, une coalition élargie autour du PCT, ou une « candidature d’unité nationale » issue de négociations interpartis, option que plusieurs chancelleries jugent la plus à même de sécuriser les investissements.
Depuis Paris, un diplomate africain estime que « la bonne tenue du congrès, et surtout la clarté des comptes, donneront le ton ; la communauté internationale observe de près la capacité congolaise à organiser un scrutin inclusif dans un environnement régional encore fragile ».
Diplomatie électorale et partenaires extérieurs
La Banque africaine de développement a déjà engagé un programme de soutien technique à la Commission électorale, visant un déploiement de terminaux biométriques dès 2025, dispositif présenté comme un gage de fiabilité par le ministère de l’Administration du territoire, en charge des opérations logistiques.
Washington et Pékin suivent le processus avec intérêt, l’un insistant sur la transparence, l’autre sur la continuité des projets d’infrastructures. Brazzaville affiche sa volonté de coopérer avec tous, soulignant que « la sérénité institutionnelle demeure le meilleur argument d’attractivité », selon le ministre des Affaires étrangères.
Perspectives à court terme
Le congrès de novembre servira de baromètre, mais la campagne officielle ne commencera qu’après la convocation du corps électoral fin 2025. D’ici là, l’UPADS devra négocier son financement, sa stratégie médiatique et la composition d’un directoire capable de tenir la longueur.
En filigrane, le pouvoir exécutif surveille la cohérence du calendrier afin d’éviter la fatigue institutionnelle et de sécuriser les réformes sociales engagées depuis 2022, notamment la gratuité progressive de la scolarité primaire et la modernisation du réseau routier nord-sud.
Un test pour la démocratie congolaise
Si le congrès parvient à offrir un leadership incontesté, le scrutin de 2026 pourrait se transformer en véritable débat d’idées plutôt qu’en duel de personnalités, ce qui renforcerait l’image d’un Congo capable de concilier stabilité institutionnelle et respiration démocratique.
À Brazzaville comme dans les capitales partenaires, l’impression prévaut que la fenêtre électorale de 2026 sera l’occasion de consolider les acquis macro-économiques, tout en démontrant que l’opposition peut se réinventer sans remettre en cause l’équilibre républicain installé depuis deux décennies.