Réémergence des PMSCs : Une menace sous-jacente
Face à une montée de l’insécurité, des insurrections jihadistes au Sahel aux menaces maritimes dans le Golfe de Guinée, les gouvernements africains font de plus en plus appel aux entreprises militaires et de sécurité privées (PMSCs). Des acteurs notoires comme le Groupe Wagner au Mali jusqu’aux firmes moins connues au Mozambique, au Nigeria et même au Kenya, ces sociétés opèrent souvent dans l’ombre, sous un écran de relative opacité. Les PMSCs sont devenues des protagonistes incontournables du paysage des conflits africains, fragilisant le tissu de l’imputabilité démocratique tout en amplifiant les influences étrangères.
L’héritage des interventions militaires privées
L’utilisation des forces militaires privées n’est pas une tendance nouvelle en Afrique. Dans les années 1990, Executive Outcomes, une entreprise sud-africaine, a marqué les esprits en intervenant en Angola et en Sierra Leone, sécurisant des zones riches en diamants en échange de succès militaires. Même si elle a été largement critiquée, cette intervention a pavé la voie aux contractuels d’aujourd’hui.
Les motivations économiques derrière les interventions
En 2021, le Groupe Wagner a commencé ses opérations au Mali, apparemment en échange de l’accès à l’or et à d’autres ressources. Comme jadis, ces groupes agissent souvent à des fins lucratives, soutenant des régimes fragiles et protégeant des actifs lucratifs. Selon une enquête de l’ONU, une opération conjointe des forces maliennes et de Wagner en mars 2022 à Moura s’est soldée par la mort d’au moins 500 civils, révélant un troc sinistre entre sécurité et richesses naturelles (UN investigation).
Contours complices des entreprises privées
Dans des situations de conflits comme au Soudan ou au Mozambique, les PMSCs ont souvent été impliquées dans des transactions où la sécurité est échangée contre des ressources naturelles, exacerbant l’instabilité et ouvrant des failles dans le contrôle étatique. Des rapports, tels que ceux d’Amnesty International, mettent en lumière des allégations de violations des droits, soulignant l’urgence de reconsidérer les responsabilités partagées des entités privées et étatiques.
Vers un avenir incertain pour la souveraineté africaine
Avec la montée des PMSCs dans les affaires de sécurité et d’intelligence, il devient difficile pour la société civile d’assurer la transparence et de maintenir une gouvernance accountable des forces. Le risque est que les États africains cèdent progressivement leur pouvoir décisionnel stratégique à des acteurs étrangers, minant à long terme leur souveraineté et la confiance dans les institutions démocratiques.
Une nouvelle feuille de route pour la sécurité durable
Pour contrecarrer la privatisation rampante de la sécurité, les gouvernements africains et les entités régionales doivent impérativement établir des cadres réglementaires rigoureux pour les PMSCs. Une convention dirigée par l’Union Africaine pourrait inspirer un modèle intégré d’oversight, visant à préserver l’intégrité, la transparence et la souveraineté des institutions publiques face aux menaces contemporaines. Face aux ambitions et influences internationales croissantes, l’Afrique doit adapter ses structures de sécurité pour affronter cette nouvelle ère de menaces hybrides et de force privatisée.