Contexte électoral 2026: enjeux et acteurs
A moins d’un an du scrutin présidentiel de mars 2026, les états-majors congolais s’agitent. Dans les salons de Brazzaville comme dans les chancelleries étrangères, une question revient: le président Denis Sassou-Nguesso sollicitera-t-il un nouveau mandat pour consolider ses réformes?
L’opinion nationale, encore marquée par les dernières législatives, observe déjà la pré-campagne se nouer. Affiches discrètes, meetings associatifs et prises de parole institutionnelles se multiplient, tandis que la Commission électorale indépendante affine le calendrier pour garantir, dit-elle, un processus inclusif et serein.
Bilan économique sous Sassou-Nguesso
Sur le front économique, le gouvernement met en avant une croissance retrouvée autour de 4 %, portée par la relance pétrolière, l’agriculture d’appoint et plusieurs agri-hubs, dont celui de Loudima inauguré cet été. Le discours officiel associe ces chiffres à la « vision » du chef de l’État.
Les bailleurs multilatéraux saluent l’effort de consolidation budgétaire engagé depuis 2023. La Banque mondiale souligne la stabilisation de la dette à 77 % du PIB, contre 98 % six ans plus tôt. Ce recul, jugé « encourageant », sert d’argument à ceux qui plaident pour la continuité.
De possibles fragilités demeurent. L’inflation, contenue à 3,5 % selon le ministère des Finances, pèse néanmoins sur le panier de la ménagère à Pointe-Noire et Dolisie. L’opposition argue que la diversification reste embryonnaire et que les créations d’emplois ne suivent pas le rythme démographique.
Stabilité régionale et diplomatie congolaise
Au plan sécuritaire, Brazzaville bénéficie d’une réputation de havre dans une sous-région écumée par les transitions militaires. La récente médiation congolaise entre Bangui et certains groupes armés, saluée par l’Union africaine, nourrit l’idée que la stabilité est devenue une « exportation » nationale.
Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Claude Gakosso, assure que « la diplomatie du Congo se fonde sur la paix et la disponibilité du président Sassou-Nguesso à dialoguer avec tous ». Ce positionnement offre un avantage comparatif alors que les électeurs associent volontiers sécurité intérieure et leadership présidentiel.
Voix de l’opposition: quelles alternatives?
Les principaux partis d’opposition – l’UPADS, le FROCAD et l’UDH-Yuki – peinent pour l’heure à désigner un champion unique. Des primaires internes sont évoquées, mais les questions d’ego et de financement compliquent l’arbitrage. Le risque d’un éclatement des voix reste élevé, selon plusieurs analystes.
Guy-Brice Parfait Kolélas, figure du scrutin 2016 décédée du Covid-19, a laissé un vide politique. Son frère Euloge Landry Kolélas tente de reprendre le flambeau, mais son audience reste limitée au Pool. Dans ce contexte, certains opposants envisagent des alliances pragmatiques plutôt qu’une confrontation frontale.
Pour l’heure, la stratégie la plus audible consiste à dénoncer « l’usure du pouvoir ». Claudine Munari, ancienne ministre des Finances, plaide pour une limitation stricte des mandats et un audit des grands projets. Elle n’exclut pas sa candidature, misant sur la carte féminine et réformatrice.
Jeunesse et emploi: défis prioritaires
Au-delà des joutes partisanes, l’emploi des jeunes domine les réseaux sociaux. Le Fonds d’impulsion, de garantie et d’accompagnement, doté de 10 milliards de francs CFA, a financé 3 200 micro-entreprises depuis 2024. Les bénéficiaires saluent un « souffle d’oxygène » mais réclament un guichet unique plus réactif.
Le gouvernement promet d’accélérer la numérisation des procédures et de lancer deux technopoles, à Brazzaville et Oyo, avant la fin du premier trimestre 2026. « La transition verte et numérique sera un marqueur de notre prochain quinquennat », confie la ministre Ingrid Olga Ghislaine Ebouka-Babackas.
Les universitaires interrogés estiment que la réussite de ces annonces passera par un réseau électrique fiable. La centrale de Liouesso, entrée partiellement en service, doit encore monter en puissance. Pour les observateurs, le chantier énergétique pourrait devenir l’un des thèmes cardinaux de la campagne.
Calendrier institutionnel et perspectives
La Commission nationale électorale indépendante a déjà publié la liste provisoire des 2,8 millions d’électeurs. Des missions d’observation de la CEEAC et de l’Union européenne sont attendues dès janvier. Brazzaville promet un accès équitable aux médias publics, sujet de contentieux lors des scrutins passés.
Les juristes rappellent que la Constitution de 2015 n’impose aucune limite d’âge au présidentiable. À 83 ans, Denis Sassou-Nguesso peut donc légalement se représenter. Ses proches nient tout « culte de la longévité » et martèlent que la décision finale sera annoncée « en temps voulu ».
Isidore Mvouba, président de l’Assemblée nationale, a récemment qualifié le chef de l’État d’« homme de la situation » devant les députés. Cette sortie, soigneusement relayée par la télévision publique, est interprétée comme un signal clair d’un prochain ralliement massif de la majorité parlementaire.
Horizon 2026: scénarios possibles
À ce stade, trois scénarios dominent les notes diplomatiques: un Sassou-Nguesso candidat et favori, une candidature du dauphin pressenti Denis-Christel Sassou-Nguesso, ou un ticket d’unité nationale incluant une figure issue de l’opposition modérée. Le premier paraît le plus probable, mais la marge reste ouverte.
Dans tous les cas, la crédibilité du prochain scrutin reposera sur la logistique électorale, la neutralité des forces de sécurité et la couverture médiatique pluraliste. Les partenaires internationaux guetteront des indicateurs précis: taux de participation, publication rapide des résultats et acceptation pacifique du verdict des urnes.