Mobilisation de la jeunesse de Nkéni-Alima
Réunis à Brazzaville le 11 août, les jeunes ressortissants du tout nouveau département de Nkéni-Alima ont solennellement invité le président Denis Sassou Nguesso à briguer un nouveau mandat en 2026, considérant son « attention particulière à l’épanouissement des jeunes », selon leur déclaration.
Devant un parterre d’élus locaux et de cadres de la majorité, l’association Jeunesse Espace Nkéni-Alima a également salué la création administrative de leur territoire, acte jugé « structurant » pour l’emploi et la formation, avant d’élire un bureau exécutif de seize membres.
Un nouvel électorat stratégique pour 2026
Dans la cartographie électorale congolaise, Nkéni-Alima comptera environ 120 000 électeurs nouveaux dès 2024, selon la Commission nationale électorale indépendante. Pour le Parti congolais du travail, ce bassin représente une réserve stratégique susceptible de consolider les 60 % obtenus dès le premier tour en 2021.
La dynamique juvénile observée ce mois d’août illustre un phénomène plus large : depuis la relance du Fonds d’aide aux PME, de nombreuses plateformes régionales se politisent, conditionnant leur soutien à la poursuite de politiques d’accès au crédit, d’incubation numérique et de désenclavement routier.
« La jeunesse veut des garanties de continuité plutôt qu’une alternance inconnue », analyse le politologue Armand Miangou, rappelant que 62 % de la population a moins de 25 ans. Le prochain scrutin se jouera donc autant sur les programmes sociaux que sur la stabilité.
Le ministère de la Jeunesse confirme travailler à un guichet unique dématérialisé pour les micro-crédits, attendu au premier trimestre 2025. Cette mesure devrait fluidifier l’accès au financement, critère récurrent des forums étudiants tenus à Dolisie, Impfondo et Nkayi ces douze derniers mois.
Les réalisations gouvernementales en toile de fond
Depuis 2021, le gouvernement a multiplié les programmes d’infrastructures intégrant Nkéni-Alima au réseau national : ponts modulaires sur la rivière Alima, fibre optique à Makoua, et extension de la zone agro-industrielle d’Oyo. Autant de réalisations que les jeunes se sont engagés à « valoriser sur le terrain ».
L’exécutif met aussi en avant la gratuité ciblée de la maternité et le programme « Santé rurale », qui a réduit de 12 % la mortalité infantile dans la Cuvette-Ouest selon le ministère de la Santé. Ces indicateurs nourrissent l’argumentaire d’un nouveau mandat de consolidation.
Pourtant, certains partenaires techniques alertent sur le rythme d’exécution budgétaire. Un rapport de la Banque africaine de développement note que 47 % des crédits engagés en 2022 seulement ont été décaissés. Brazzaville assure que la réforme de la commande publique, effective depuis juin, résorbera ces retards.
Opposition et société civile : réactions mesurées
L’opposition, emmenée par l’Union des démocrates humanistes, reconnaît l’importance de la jeunesse de Nkéni-Alima mais déplore un « climat d’inégalité d’accès aux médias ». Elle exhorte la Haute autorité de régulation de la communication à garantir des temps d’antenne identiques pour tous les prétendants.
De son côté, le Réseau des organisations de la société civile appelle à une réforme partielle du code électoral, notamment sur le financement des campagnes. Le ministère de l’Intérieur confirme « examiner des ajustements », signe d’une ouverture institutionnelle sans pour autant bouleverser le calendrier établi.
Enjeu diplomatique et stabilité régionale
Sur le plan régional, la stabilité du Congo est scrutée par la Communauté économique des États de l’Afrique centrale. Un mandat reconduit en 2026 permettrait, selon un diplomate gabonais, « de maintenir un ancrage sécuritaire dans le nord face aux menaces transfrontalières ».
Brazzaville affiche par ailleurs une coopération énergique avec Pékin et Doha pour l’achèvement du corridor routier 1. Cette artère, longue de 540 kilomètres, doit relier Pointe-Noire à Ouesso en transitant par Nkéni-Alima, consolidant ainsi la position logistique du pays.
Les bailleurs redoutent toutefois une remontée de la dette publique, passée de 83 % à 88 % du PIB entre 2021 et 2023. Le ministère des Finances souligne que 60 % du portefeuille est libellé en yuans, avec un rééchelonnement négocié jusqu’en 2040.
Les investisseurs privés, surtout sud-africains, observent néanmoins « une progression positive de l’environnement des affaires », citant la création d’un tribunal du commerce à Brazzaville et l’adoption d’un code des partenariats public-privé, instruments perçus comme des signaux d’engagement gouvernemental.
Perspectives sur la campagne et agenda institutionnel
La Commission électorale dévoilera le calendrier détaillé en janvier 2025. D’ici là, les partis affûtent leurs congrès. Le PCT envisage de proposer officiellement la candidature du chef de l’État lors d’une convention nationale à Owando, ville symbole du rééquilibrage territorial.
En coulisses, plusieurs ministres testent pourtant leur popularité à travers des tournées de compte-rendu parlementaire. Les observateurs y voient une mise en scène destinée à négocier des portefeuilles clés plutôt qu’une réelle contestation, confirmant une majorité globalement soudée autour du président sortant.
Pour la société civile, l’enjeu sera aussi de pousser la future loi sur le service civique universel, encore débattue au Sénat. Inspiré du modèle rwandais, ce dispositif vise à offrir une première expérience professionnelle à 30 000 jeunes par an, sécurisant leur insertion et leur citoyenneté.
À dix-huit mois de l’ouverture officielle de la campagne, la mobilisation de Nkéni-Alima sonne comme un baromètre précoce. Elle met en lumière la centralité de la jeunesse dans le débat, tout en confirmant que la stabilité reste, pour beaucoup d’électeurs, le premier critère de choix.