Première conférence sous haute tension électorale
Dans la salle des congrès drapée de bleu, blanc et jaune, plus de sept cents délégués ont répondu fin août à l’appel de l’Initiative G.a.e, mieux connue sous le nom de Génération auto-entrepreneurs, pour une première conférence censée tester la solidité du réseau.
Le coordonnateur général, Digne Elvis Okombi-Tsalissan, est entré sous les ovations d’une fanfare tonitruante, relançant une audience que trois heures d’attente n’avaient pas totalement refroidie; signe, selon les organisateurs, d’une motivation qui dépasse les aléas protocolaires.
Un soutien affiché au président Denis Sassou Nguesso
Thème choisi, « Le rôle des masses populaires dans la préparation électorale », le ton est donné : l’Initiative se positionne clairement pour la réélection du président Denis Sassou Nguesso lors du scrutin de mars 2026, tout en se défendant de n’être qu’une courroie partisane.
« À travers le nom du Patriarche, nous pouvons encore rassembler ce pays », cite Okombi-Tsalissan, attribuant la formule au « président d’honneur » sans le nommer, une référence transparente à M. Sassou Nguesso qui consolide subtilement le lien entre l’appareil associatif et l’exécutif.
Déploiement territorial avant la révision des listes
Afin de transformer l’enthousiasme en force électorale, les sept cents délégués, tous en chemises blanches et écharpes bleu-jaune, sont repartis avec le mandat de lancer des comités de soutien dans chaque circonscription des quinze départements, avant la révision des listes prévue en septembre et octobre.
Okombi-Tsalissan insiste sur la capillarité : il veut que l’Initiative soit identifiée jusque dans « les savanes, les forêts, les rivières », formule reprise en boucle qui rappelle les tournées rurales menées lors des scrutins précédents pour maximiser la participation dans les zones éloignées.
Dans les coulisses, plusieurs cadres gouvernementaux saluent ce quadrillage, arguant que la centralisation des données remontera plus vite vers la Coordination nationale des élections, évitant ainsi les flottements qui avaient marqué la présidentielle de 2021, notamment dans le Pool et la Sangha.
Former pour voter : la bataille de la participation
Au cœur des ateliers, des juristes détaillent les étapes d’inscription, des statisticiens projettent l’impact d’un gain d’un seul point de participation : près de 15 000 voix supplémentaires à l’échelle nationale, selon leurs simulations, un chiffre loin d’être négligeable dans un scrutin à un tour.
Le coordonnateur rappelle une constante démocratique : « Une fois derrière l’isoloir, le professeur et le jeune auto-entrepreneur ont le même pouvoir ». Ce rappel à l’égalité républicaine vise aussi à neutraliser les critiques sur la sociologie supposée élitiste du mouvement.
Pour prévenir la démobilisation numérique souvent observée en zone urbaine, l’équipe communication teste un portail mobile permettant aux militants de signaler en temps réel les obstacles rencontrés lors de l’enrôlement ; les développeurs promettent une version grand public avant la fin de l’année.
Empathie sociale et réponse aux critiques
L’orateur a également taclé « délations et fake news », exhortant ses troupes à cultiver patience et tolérance. L’allusion vise les controverses en ligne où les initiatives citoyennes pro-gouvernementales sont parfois accusées d’opacité financière, un sujet esquivé, mais suffisamment reconnu pour mériter un rappel.
Surtout, Okombi-Tsalissan place l’empathie au centre avec l’opération « Matissa affaire », initiative sociale consistant à écouter chômeurs et artisans avant de formuler des réponses ciblées : micro-crédits, formations express, appui logistique pour les petits commerces, autant de gestes susceptibles d’élargir la base électorale.
Des économistes proches du gouvernement soutiennent la démarche : une meilleure inclusion des auto-entrepreneurs favoriserait la formalisation de l’économie informelle, argument qui trouve un écho positif chez certains partenaires au développement, intéressés par une traçabilité accrue de la création de valeur nationale.
Vers une institutionnalisation post-2026
Au-delà de la seule candidature de M. Sassou Nguesso, l’Initiative G.a.e se rêve en incubateur civique pérenne. Ses dirigeants évoquent déjà, sans trop s’attarder, des programmes de suivi parlementaire ou de contrôle budgétaire locaux, signes d’une volonté de s’institutionnaliser après 2026.
Cette projection à long terme satisfait nombre de diplomates basés à Brazzaville, pour qui la consolidation de structures intermédiaires entre État et citoyens participe à la stabilité politique, critère scruté à la loupe à l’approche d’une échéance présidentielle souvent perçue comme sensible.
Les observateurs notent toutefois que la réussite dépendra de la capacité à maintenir la dynamique au-delà des grands rassemblements. Les retards observés lors de l’ouverture de la conférence rappellent qu’une logistique perfectible peut rapidement émousser les ardeurs, surtout chez les primo-votants.
Cap sur la jeunesse, moteur de la campagne
En attendant, le Patriarche engrange un capital symbolique indéniable : mobiliser la jeunesse autour d’un récit national qui fait de la participation électorale un acte de patriotisme. Si l’élan se confirme, la présidentielle de 2026 pourrait se jouer autant sur la forme que sur le fond.
Comme l’explique un jeune délégué, « notre génération veut prouver qu’elle sait conjuguer entrepreneuriat et citoyenneté ». À huit mois du dépôt officiel des candidatures, la phrase résonne comme un programme, mais aussi comme un rappel de l’urgence à transformer la ferveur en bulletins.
Le calendrier dévoilé prévoit un deuxième conclave en janvier, juste après la publication des listes définitives. Les coordinateurs espèrent y mesurer, chiffres à l’appui, les progrès obtenus sur le terrain.