Une mobilisation financière présentée comme gage de discipline interne
Le vieux précepte selon lequel « celui qui veut aller loin ménage sa monture » trouve, ces jours-ci, une application tangible au siège du Parti congolais du travail. Sur instruction de son secrétaire général, Pierre Moussa, l’ensemble des dirigeants, cadres, militants et sympathisants est convié, le 9 juillet prochain au palais des congrès de Brazzaville, à la cérémonie inaugurale des travaux préparatoires du sixième congrès ordinaire et au lancement d’une cotisation spéciale. Cette levée de fonds, d’envergure nationale, est destinée à garantir l’autonomie budgétaire d’un rendez-vous dont l’importance politique n’échappe à personne.
Un congrès attendu dans le troisième quadrimestre 2025
Si la date officielle du congrès n’a pas encore été publiée, le porte-parole du PCT, Parfait Iloki, précise qu’il devrait se tenir entre septembre et décembre 2025, soit six à neuf mois avant la présidentielle de mars 2026. Le calendrier obéit à une logique stratégique : disposer d’un délai confortable pour faire connaître le candidat, calibrer le programme et ancrer la campagne sur l’ensemble du territoire. Le parti au pouvoir fait ainsi montre d’un sens de l’anticipation présenté par ses cadres comme un « gage de stabilité » dans un environnement régional parfois volatil.
Désignation d’un candidat : entre continuité institutionnelle et attente populaire
Le congrès devra d’abord élire un nouveau secrétariat permanent, appelé à succéder à l’équipe issue du cinquième congrès de décembre 2019 à Kintélé. Les statuts confèrent ensuite au comité central le soin d’investir le candidat présidentiel. Au sein des cercles dirigeants, la possibilité constitutionnelle d’un cinquième mandat pour Denis Sassou Nguesso est évoquée « avec respect et lucidité », selon un proche conseiller. Pour nombre de militants, le chef de l’État incarne la garantie d’un cap éprouvé, tandis que certains cadres estiment qu’un rajeunissement, voire l’émergence d’un binôme générationnel, pourrait renforcer l’attractivité électorale du parti. La décision finale, attendue au plus tard en janvier 2026, nourrira sans doute les conversations diplomatiques.
Le financement participatif comme outil de cohésion
La cotisation spéciale voulue par Pierre Moussa s’inscrit dans une tradition d’autofinancement entamée dès la création du PCT par le président Marien Ngouabi en 1968. Les responsables locaux sont invités à fixer des objectifs chiffrés réalistes, reflétant la capacité contributive des sections. En retour, le secrétariat permanent promet une redistribution transparente des budgets, assortie d’un reporting semestriel. Au-delà de la trésorerie, l’exercice vise à galvaniser la base dans l’optique de la campagne. Comme le souligne l’économiste Patrick Ossélé, « la participation financière renforce le sentiment d’appartenance et limite la tentation de l’abstention le jour du vote ».
Dynamique électorale : le poids décisif des alliances politiques
À l’élection de mars 2021, la majorité présidentielle réunie autour du PCT avait recueilli plus de 88 % des suffrages validés par la Cour constitutionnelle. Les observateurs prévoient que le parti conservera l’appui des principaux alliés, parmi lesquels le RDD de Jean-Jacques Yhombi-Opango fils et le Club 2002 de Wilfrid Banga. Toutefois, dans un contexte africain où la jeunesse revendique une participation accrue, le PCT entend étoffer ses canaux de communication numérique, notamment grâce aux « web-comités » installés dans les universités de Brazzaville et Pointe-Noire.
Opposition et société civile : des interlocuteurs à ménager
Plusieurs organisations citoyennes plaident pour un scrutin apaisé, citant les récentes transitions mal maîtrisées chez certains voisins. Le gouvernement affirme partager cette préoccupation et rappelle l’invitation permanente faite à l’opposition à rejoindre le dialogue républicain. Selon un diplomate de l’Union africaine en poste à Brazzaville, « les signaux d’ouverture envoyés par le pouvoir, combinés à la discipline historique du PCT, créent un climat politique plus prévisible que la moyenne régionale ». Pour autant, des partis non alignés réclament davantage de garanties logistiques, notamment l’audit des listes électorales et la consolidation de la biométrie.
Enjeux socio-économiques et crédibilité internationale
À l’heure où le pays renégocie un programme avec le FMI et mise sur la diversification post-pétrole, la prochaine présidentielle sera jugée à l’aune de la stabilité institutionnelle. Les investisseurs, eux, scrutent la capacité du futur exécutif à poursuivre les projets d’interconnexion régionale au sein de la CEEAC. Dans cette perspective, la préparation méticuleuse du congrès du PCT apparaît comme un signal de continuité rassurant pour les bailleurs publics et privés.
Vers 2026 : cap sur une campagne qui se veut exemplaire
En définitive, le grand oral de 2025 constituera pour le PCT l’ultime répétition générale avant l’échéance suprême. La collecte de fonds, loin de se réduire à un exercice de trésorerie, se présente comme un test grandeur nature de la capacité de mobilisation des structures de base. Dans un contexte marqué par la quête d’emplois pour la jeunesse et les interrogations environnementales liées au bassin du Congo, le parti au pouvoir affirme vouloir articuler son programme autour d’un triptyque « Paix, modernisation, inclusion ».
À treize mois du congrès, l’heure n’est certes pas aux oracles, mais la mécanique semble huilée. Les diplomates suivent de près l’évolution des équilibres internes, conscients que la ligne qui sortira de Brazzaville ne manquera pas d’influencer les rapports de force dans toute l’Afrique centrale.