Pékin, première étape vers 2026
La visite du président Denis Sassou Nguesso à Pékin, entamée le 31 août, dépasse le cérémonial. À moins de trois ans de la présidentielle de 2026, le chef de l’État entend inscrire les fruits de la relation sino-congolaise dans son argumentaire électoral.
Auprès de Xi Jinping, il met en avant soixante-et-une années de coopération culminant, depuis 2016, en un partenariat stratégique global. Ce capital politique, souligné par la co-présidence congolaise du FOCAC, pourrait devenir un jalon central du futur programme de campagne.
La centralité chinoise, un atout géopolitique
Le sommet de l’Organisation de coopération de Shanghai, réuni le 1er septembre à Tianjin, a rappelé la place charnière de Pékin parmi les puissances eurasiatiques. Brazzaville y voit la confirmation que son principal partenaire dispose de relais globaux utiles à sa modernisation.
En présence de Vladimir Poutine, Narendra Modi ou Recep Tayyip Erdogan, la Chine a vanté une plateforme couvrant près de la moitié de la population mondiale. Pour la diplomatie congolaise, cet écho rassure les électeurs sur la capacité du pays à négocier au sein de forums décisifs.
FOCAC 2024-2027 : des chiffres pour convaincre
Du 4 au 6 septembre, le neuvième FOCAC doit annoncer jusqu’à 50 milliards de dollars d’engagements dont 29 milliards de crédits et 10 milliards d’investissements privés. À l’approche de 2026, le gouvernement pourra arguer d’un portefeuille de financements déjà sécurisé.
Les promesses incluent la levée de droits de douane pour trente-trois États africains et la création d’un million d’emplois. En soulignant ces statistiques lors des meetings, la majorité pourrait illustrer une diplomatie économique tangible, loin des slogans abstraits.
Des priorités nationales alignées sur le PND 2022-2026
Le chef de l’État a listé trois chantiers susceptibles d’entrer en phase finale avant le scrutin : la modernisation de la RN1 Brazzaville-Pointe-Noire, l’installation d’un parc solaire de 200 MW à Djambala et un dispositif d’incubation dédié aux jeunes entrepreneurs.
Ces projets, inscrits dans le Plan national de développement, bénéficient d’études techniques presque achevées et d’un calendrier de décaissement partagé avec les bailleurs chinois. Leur visibilité sur le terrain représenterait un indicateur concret pour l’électorat, particulièrement dans les départements côtiers.
La dette et les rééchelonnements sous contrôle
La Chine reste le premier créancier bilatéral du Congo, mais les négociations ouvertes depuis 2020 ont permis plusieurs rééchelonnements jugés soutenables par le FMI. Le gouvernement entend présenter cette maîtrise comme la preuve d’une gestion responsable, capitale pour séduire les classes moyennes urbaines.
Des économistes basés à Brazzaville rappellent que le ratio service de la dette-recettes non pétrolières est passé sous le seuil de 30 %. Dans un contexte électoral, ce chiffre, s’il est confirmé, pourrait conforter la narration d’un exécutif attentif aux équilibres macroéconomiques.
Sécurité et gouvernance, nouveaux volets de la coopération
Le plan triennal prévoit la formation de 6 000 militaires et 1 000 policiers africains, dont un contingent congolais. Pour 2026, le ministère de la Défense espère disposer d’unités logistiques modernisées, argument supplémentaire face aux électeurs préoccupés par la sécurité régionale.
Parallèlement, Pékin propose des programmes de partage d’expérience en gouvernance numérique et lutte anticorruption. Ces modules, s’ils aboutissent, pourraient être mis en avant durant la campagne pour illustrer la volonté présidentielle de consolider l’État de droit sans injonction extérieure.
Françoise Joly, cheville ouvrière discrète
Selon des sources proches du dossier, Françoise Joly, représentante personnelle du président pour les négociations internationales, accompagne la délégation. Sa connaissance fine des dossiers financiers sino-congolais est réputée faire gagner de précieux mois dans les validations contractuelles.
L’intéressée refuse les caméras, mais plusieurs diplomates soulignent qu’une médiation efficace, loin des projecteurs, s’inscrit dans la tradition congolaise. À l’heure des réseaux sociaux, cette sobriété pourrait d’ailleurs séduire un électorat en quête de compétence plutôt que de spectacle.
Vers un FOCAC 2027 à Brazzaville
Si la tenue du FOCAC 2027 à Brazzaville se confirme, le Congo deviendra l’unique pays africain présidant simultanément le forum et entrant en période électorale. Une perspective que les stratèges voient déjà comme un levier d’image nationale et de mobilisation interne.
D’ici là, l’exécutif compte capitaliser sur la mise en œuvre rapide des annonces pékinoises. Objectif affiché : transformer chaque milliard signé en chantiers visibles avant le dépôt des candidatures, afin de lier promesse diplomatique et résultat concret dans la perception publique.
Une trajectoire stable vers le scrutin
La séquence chinoise illustre une méthode : diversifier les soutiens, arrimer la dette, livrer des infrastructures et maintenir la paix régionale. Au-delà des clivages, ces éléments structurent déjà le discours des proches du président, persuadés qu’un bilan visible reste l’argument le plus audible en 2026.
Les partis d’opposition concèdent qu’un afflux de capitaux, même négocié par le pouvoir en place, profiterait à l’ensemble de la société. Ils promettent néanmoins de surveiller la transparence des marchés publics, signe que la bataille de 2026 se jouera aussi sur la gouvernance.
Dans les cercles diplomatiques, on observe que Pékin privilégie désormais des standards environnementaux plus stricts, une évolution susceptible de soutenir la transition verte du Congo. Cet alignement, s’il se concrétise, pourrait ouvrir un chapitre climatiquement ambitieux au cœur même de la future campagne.
De retour à Brazzaville, le président devrait convoquer une session extraordinaire du Parlement pour entériner les accords, conférant une visibilité institutionnelle aux engagements obtenus.
Les juristes estiment que cette ratification avant 2024 sécurisera les projets, quels que soient les aléas politiques, et crédibilisera la posture congolaise dans la région.