Brazzaville face au miroir du devoir citoyen
À moins de deux ans du scrutin présidentiel, la capitale congolaise bruisse déjà des interrogations qui précèdent les grands rendez-vous démocratiques. Dans un entretien accordé en marge d’un séminaire consacré à l’intelligence technologique et à la coopération Sud-Sud, Jacorcel Obabaka, conseiller municipal de Brazzaville et membre engagé du Parti congolais du travail, a livré une réflexion qui tranche avec la tentation de la politique spectacle. Sa formule, « La politique n’est pas une vitrine mais un devoir », résonne comme un rappel à l’ordre républicain dans un contexte où les réseaux sociaux amplifient la recherche de notoriété plus que la quête de solutions concrètes.
La politique comme sacerdoce républicain
Entré en 2009 dans l’arène publique, Obabaka insiste sur la dimension presque sacerdotale de la fonction élective. Il revendique le choix de demeurer à l’échelon municipal pour « rendre l’action publique palpable », convaincu que l’efficacité nationale se construit d’abord à l’échelle de la rue pavée, de l’école de quartier ou du dispensaire périphérique. Le jeune responsable déplore la dérive qui consisterait à transformer l’engagement partisan en tremplin vers un confort personnel et rappelle que le mandat électif demeure, dans la tradition congolaise, un contrat moral avec la communauté.
Cap sur une diplomatie économique assumée
Le choix de Pékin pour partager ces convictions n’est pas anodin. La Chine figure parmi les partenaires privilégiés du Congo dans l’édification d’infrastructures routières, énergétiques et numériques. Pour Obabaka, l’ouverture d’une véritable diplomatie économique constitue une ligne de force du président Denis Sassou Nguesso. Elle s’inscrit dans une logique d’attraction des capitaux et de transfert de compétences qui, à terme, doit consolider la souveraineté nationale face aux fluctuations des cours pétroliers. « Nos interlocuteurs ne souhaitent pas seulement investir, ils demandent des interlocuteurs crédibles au plan local », souligne-t-il, convaincu que la cohérence et la stabilité du pouvoir demeurent des atouts.
Services sociaux, l’indispensable accélération
Si l’unité nationale et la paix civile sont fréquemment citées comme réussites majeures de l’actuel chef de l’État, Obabaka reconnaît l’impatience qui traverse la jeunesse lorsqu’il s’agit de santé, d’éducation ou de fourniture d’eau et d’électricité. Il en appelle à un « choc d’exécution » afin de convertir les plans directeurs en réalisations tangibles, rappelant que le président a déjà posé le diagnostic en déclarant la décennie 2021-2030 celle de la diversification économique. Selon le conseiller municipal, les lenteurs constatées relèvent « moins d’un défaut de vision que de la nécessité d’outils administratifs modernisés ». L’échéance de 2026 apparaît dès lors comme un jalon pour mesurer la capacité de l’appareil d’État à adapter son rythme aux attentes sociales.
Collectivités locales, laboratoires de confiance
Dans une République historiquement centralisée, le débat sur la responsabilisation des collectivités revient avec insistance. Obabaka plaide pour un transfert maîtrisé de compétences budgétaires, persuadé que « la proximité nourrit la redevabilité ». À ses yeux, moderniser la relation entre l’administration et la population passe par une renaissance des conseils départementaux et municipaux, lesquels doivent devenir de véritables interfaces de médiation et non de simples relais des décisions nationales. Cette logique décentralisatrice, soutenue par plusieurs partenaires techniques, épouse la volonté présidentielle de consolider un État efficace sans remettre en cause son unité.
2026, test de maturité démocratique
Interrogé sur ses intentions de vote, le jeune élu déclare sans détour soutenir la candidature de Denis Sassou Nguesso, figure qu’il définit comme « un homme d’État expérimenté » ayant su préserver la cohésion dans un environnement régional marqué par l’instabilité. Pour lui, la prochaine campagne ne devrait pas opposer ruptures artificielles et continuités stériles mais inviter à un débat sur la qualité de l’exécution des politiques publiques, enjeu décisif pour la transformation structurelle du pays. En filigrane, l’idée d’une continuité réformatrice se dessine : garder le cap de la stabilité tout en accélérant la modernisation administrative et la redistribution sociale.
À mesure que se rapproche le scrutin de mars 2026, le discours d’Obabaka s’inscrit dans une dynamique de consolidation institutionnelle. Son appel à un militantisme de service résonne comme une injonction à remettre le devoir au cœur de l’action publique. Dans un paysage politique souvent animé par la rhétorique de l’urgence, cette profession de foi rappelle que la stabilité conquise n’a de sens que si elle se traduit par des progrès mesurables pour les citoyens. Le rendez-vous électoral s’annonce donc non seulement comme un choix de personne, mais aussi comme un référendum silencieux sur la capacité collective à hisser la gouvernance au niveau des aspirations populaires.